Epargne - Comment protéger votre épargne de l'inflation

A plus de 3 %, l'inflation mord sur l'épargne. Pour s'en protéger, certains placements valent nettement mieux que d'autres.

Ce n'est pas le retour des années 70/80 et de l'inflation galopant à deux chiffres. Mais, après plusieurs années pendant lesquelles les prix sont restés d'une immense sagesse, la flambée de l'énergie et de l'alimentation remet l'érosion du pouvoir d'achat au coeur des débats. Avec un taux de 3 % en rythme annuel (3,3 % en zone euro), son impact sur l'épargne devient d'ailleurs sensible, puisque plusieurs placements sûrs ne rapportent presque plus rien en termes réels. C'est le cas pour des assurances-vie au rabais qui distribuent un taux de 3,5 %, devenant 3,15 % après paiement des prélèvements sociaux. Mais aussi pour des comptes sur livrets bancaires qui, passé les périodes de promotion, rapportent moins de 3 % et font perdre en ce moment du pouvoir d'achat. Même si peu d'économistes s'inquiètent réellement de la réapparition de l'hydre dévoreur de valeur-ils sont toutefois un peu plus nombreux chaque semaine-, mieux vaut rester vigilant et garder en mémoire que tous les placements n'y réagissent pas de la même manière. Et si beaucoup en souffrent (lire ci-après), d'autres réussissent plutôt bien à composer avec elle.

Liquidités, l'abri sommaire

Quand les prix s'envolent, les placements liquides, à court terme, ne sont pas un havre de paix. Même si les taux d'intérêt augmentent, la progression suit rarement le niveau de l'érosion du pouvoir d'achat. Pendant les années 80, le livret A était ainsi un gouffre pour l'épargne, car le taux de rémunération était inférieur à celui de la hausse des prix.

« Aujourd'hui, avec des taux directeurs à 4 % en Europe, les liquidités sont correctement rémunérées et permettent d'engranger des gains légèrement supérieurs à l'inflation et plus importants que ceux dégagés par des obligations à moyen ou long terme », commente Jean-Marc Bernon, directeur de la gestion privée chez Fortis. Pour placer sans risque un capital pendant quelques mois, les livrets réglementés (livret A ou B, Jeunes, de Développement durable, d'Epargne populaire) et les certificats de dépôt ou autres comptes à terme permettent, sans aucune prise de risque, de continuer à valoriser une épargne. Reste à ne pas s'endormir sur cet argent : si les taux à court terme diminuent ou si l'inflation monte (ce qui profiterait mécaniquement à l'épargne réglementée), il sera temps de refaire le point sur le meilleur usage de ces sommes.

Obligations indexées : un danger peut en cacher un autre

Les obligations n'aiment pas l'inflation. Mais, parmi les différentes catégories émises par les Etats ou les entreprises, il en existe qui peuvent retenir l'attention quand les prix partent à la hausse. Dans ce domaine, c'est l'Etat français qui apporte la plus grosse pierre à l'édifice avec les OATi, c'est-à-dire les obligations assimilables au Trésor indexées à l'inflation. Elles délivrent un rendement régulier indexé sur le coût de la vie. C'est tout bénéfice quand l'inflation pointe son nez, car la rémunération augmente. Mais, à l'inverse, si les prix diminuent, le rendement baisse. Ces OATi ont néanmoins plusieurs inconvénients. Comme toutes les obligations, elles sont sensibles aux mouvements de taux d'intérêt et perdent de la valeur quand ceux-ci augmentent. De plus, la fiscalité des intérêts leur enlève beaucoup de charme, ces derniers étant taxés dès le premier euro à 29 %. Sur une rémunération actuelle à peine supérieure à 4 %, il reste en net moins de 3 %. A l'arrivée, avec une inflation raisonnable, le jeu n'en vaut pas la chandelle. Mais si le compteur s'emballe, c'est une carte sur laquelle il est possible de compter.

Les sicav d'obligations indexées à l'inflation sont plus simples à acquérir auprès de n'importe quel intermédiaire financier. Elles investissent elles aussi sur les OATi, mais tout en se réservant la possibilité d'élargir leur palette avec des obligations à taux variable, voire à taux fixe quand la menace inflationniste est faible. Sur un an, selon Morningstar, elles ont progressé en moyenne de 5,4 %. Détenues au sein d'une assurance-vie, de telles sicav échappent en outre à l'essentiel des impôts. En revanche, elles baissent quand les taux d'intérêt à moyen ou long terme augmentent.

Actions, un temps d'adaptation

« La couverture la plus efficace contre l'inflation est apportée par les biens réels, rappelle Philippe Baillot, directeur de Bred Banque privée. Pour se prémunir d'une hausse des prix, il faut donc investir en actions, car la valeur des entreprises répercute à long terme l'envolée des prix. » A court terme, c'est un peu moins vrai, car l'inflation se traduit généralement par une remontée des taux d'intérêt qui n'est pas favorable aux marchés boursiers. De plus, toutes les entreprises ne sont pas en mesure de répercuter la hausse des coûts : « Il vaut mieux privilégier celles qui ont le plus de latitude pour adapter leurs tarifs, comme les sociétés d'autoroutes », éclaire Philippe Baillot.

Immobilier, trouver des opportunités

La pierre représente un rempart historique contre l'inflation. La valeur des biens répercute en général la hausse des prix et, lorsqu'il s'agit d'immobilier locatif, les loyers suivent de près le rythme de l'inflation. Pour protéger un patrimoine à long terme, il est difficile de faire mieux, d'autant que les rendements demeurent à un niveau supérieur à celui des placements sans risque. La situation actuelle, avec des prix de marché qui atteignent des sommets en habitation, incite toutefois à la prudence. Quant aux SCPI et à l'immobilier professionnel, ils sont dépendants de la demande des entreprises et de la bonne forme économique du pays. Y investir aujourd'hui, cela revient à prendre un pari sur la poursuite de la croissance. Un pari auquel Jean-Marc Bernon ne croit guère : « Les taux de rendement devraient baisser », pronostique-t-il.

Or, foncier, matières premières...

Au même titre que l'immobilier, les autres biens réels protègent historiquement de l'inflation. Investir sur les matières premières au travers de trackers, de certificats, de sociétés pétrolières ou d'actifs énergétiques vous conduit à profiter directement de la hausse des prix. L'or, en revanche, n'évolue plus au rythme de l'inflation et, alors que les prix en général montent, son cours ne cesse de baisser depuis plusieurs mois. Le foncier suit aussi l'évolution des prix, mais les rendements frisent le ridicule et il y a mieux à faire pour se protéger d'un risque qui est encore limité

Vive le crédit

Les grands gagnants en période d'inflation sont les emprunteurs qui ont misé sur un prêt à taux fixe : leurs mensualités restent en l'état pendant que les autres prix s'envolent. Pour peu que les salaires augmentent pour maintenir le pouvoir d'achat, c'est tout bon ! C'est tout bon aussi pour les investisseurs en immobilier locatif, en direct ou via des SCPI : les revenus tirés de leurs placements ont de fortes chances de s'apprécier pour s'adapter à la hausse des prix, alors que les mensualités resteront fixes. Si vous avez un projet immobilier en tête, pensez-y...

Ces placements qui n'aiment pas l'inflation

Quand les prix s'envolent, un type de placement n'en profite pas : les obligations. Les investisseurs qui en ont acheté en 2006 à moins de 3,5 % avant frais et impôts peuvent en témoigner. Emises avec un taux fixe, elles ne répercutent pas les remontées de taux d'intérêt qui accompagnent l'inflation. Et elles perdent même de la valeur, car leur prix est diminué en Bourse de manière que leur rendement corresponde à celui en vigueur sur les marchés.

« Si vous pariez sur une forte reprise de l'inflation, il faut s'écarter des obligations à taux fixe en direct, mais aussi des sicav d'obligations et des fonds en euros d'assurance-vie, qui sont essentiellement investis dans les emprunts d'Etat ou privés », recommande ainsi Philippe Baillot, directeur de Bred Banque privée. Il met aussi en garde les candidats à la rente viagère par capitalisation, « car elle n'offre aucune protection contre l'inflation et les rentes perdent leur pouvoir d'achat quand les prix augmentent au-delà des taux de revalorisation ». Des taux qui, d'ores et déjà, se situent fréquemment au-dessous de 3 % par an.
Les fonds « à formule » peuvent également se révéler défavorables s'ils ne remboursent que le capital garanti au terme : avec une inflation à 3 % par an pendant huit ans, le pouvoir d'achat de votre mise initiale aura fondu de 30 % en huit ans si le pari n'a pas fonctionné. En règle générale, les spécialistes recommandent d'ailleurs de ne pas s'engager dans des formules où l'épargne est bloquée plus de quelques mois, afin de pouvoir saisir en permanence les meilleures opportunités. Source : Le point

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